En 2012, le prix de la viande de boucherie (bœuf, porc hors charcuterie, veau, agneau et viande chevaline) s’est élevé, en moyenne, à 10,58 euros soit une augmentation de 4,2% par rapport à 2011. C’est près de 25% de plus qu'il y a dix ans.
A ce rythme, la viande de boucherie va-t-elle devenir un produit de luxe ou peut-on repenser un équilibre différent ? Entre une demande en baisse en France et une offre de plus en plus coûteuse, peut-on valoriser des morceaux de viande moins connus et moins coûteux ?
Pour mieux comprendre les raisons de cette hausse des prix et appréhender les solutions possibles, deux invités et experts répondent à toutes les questions de « C’est pas tranché » :
- Olivier Andrault, Ingénieur agro-alimentaire et chargé de mission « Alimentation et Nutrition » à l’UFC-Que Choisir,
- Gérard Cladière, Président du groupe viande de la FCD (Fédération du commerce et de la distribution) et responsable Boucherie d’une grande enseigne de distribution.
Les clés pour comprendre
L’observatoire des prix et des marges
L’observatoire des prix et des marges des produits alimentaires a été créé par la loi de modernisation agricole de 2010. Cette instance consultative, au sein de laquelle sont représentées les familles professionnelles et les consommateurs, a pour but d’éclairer les acteurs économiques et les pouvoirs publics sur la formation des prix et des marges au cours des transactions au sein de la chaîne alimentaire. Il entend contribuer ainsi à la transparence dans la formation des prix et inciter au dialogue entre les partenaires de la filière. L’observatoire est présidé par un économiste spécialiste des matières premières, Philippe Chalmin. Celui-ci a présenté le 13 novembre dernier le deuxième rapport de l’observatoire, qui fait notamment apparaître pour la première fois les marges nettes dans la grande distribution dans chaque rayon alimentaire. Il est téléchargeable ici : http://agriculture.gouv.fr
De la carcasse au steak, des transformations multiples
La viande bovine telle qu’elle est proposée aux consommateurs est issue d’un travail de sélection qui contribue à expliquer d’importantes variations de prix entre le prix de la carcasse et celui de la viande. En moyenne, seulement 45% du poids vif d’un bovin est effectivement destinée à la consommation humaine (sources FranceAgriMer, Celene). Les os, le suif (le résidu issu de la fonte de la graisse animale) ou encore les peaux en ont été retirés. La plus grande partie de ces coproduits est commercialisée, à des prix très variables d’un usage à l’autre : tanneries pour les peaux, fabricants d’alimentation pour animaux pour le sang notamment ou encore fabricants de gélatine pour certains os. Une petite partie de la carcasse, enfin, est détruite, pour des raisons sanitaires. Cette dernière opération représente des coûts qu’il est nécessaire de reporter sur le prix de la viande commercialisée.
La demande influe sur le prix de la viande
Le contexte économique a une influence certaine sur le prix de la viande à la consommation. La hausse du prix des matières premières utilisées dans l’alimentation des animaux, la baisse de la production en Europe et en Amérique du Sud depuis deux ans ou encore la hausse de la demande mondiale sont des facteurs pesant sur la détermination du prix.
Des différences de prix selon les morceaux
Les différences de prix d’un morceau à l’autre s’expliquent de leur côté par l’intérêt plus grand des consommateurs pour certaines pièces « nobles » comme le filet, qui ne représentent qu’une très faible partie d’une carcasse. Alors que le prix moyen de la viande de boucherie commercialisée en grande distribution s’établit à 10,58 €, certaines pièces sont ainsi vendues à des prix sensiblement plus élevés tandis que d’autres morceaux sont vendus nettement moins chers, soit une fourchette qui peut aller en moyenne de 5 à 40 euros le kilo selon les morceaux.
Des produits bon marché à mieux mettre en valeur
Les professionnels de la viande ont trouvé des réponses pour rendre les pièces moins nobles accessibles aux consommateurs : les jeunes plébiscitent ainsi le steak haché. Mais les producteurs ont aussi à cœur de faciliter la compréhension des différentes pièces de viande bovine, dont certaines restent très bon marché, et de les mettre en valeur. De plus en plus couramment, les barquettes affichent des temps de cuisson, voire des recettes. Les professionnels réfléchissent actuellement avec les pouvoirs publics et les consommateurs à la création de dénominations nouvelles et facilement compréhensibles pour identifier les différents morceaux. Les viandes ayant les mêmes qualités de tendreté ou des temps de cuisson comparables pourraient être regroupées sous une même dénomination.