Bernard Pivot ne s’y est pas trompé, dans sa chronique hebdomadaire au JDD*, en faisant l’éloge du livre de Rosamund Young, La vie secrète des vaches. Il loue à la fois le style et l’humour, le fond et la forme d’un récit émouvant qui nous entraîne dans la campagne anglaise avec une fermière dont nous partageons le quotidien.
Entre paître et paraître, un récit empreint de tendresse
L’académicien Goncourt est d’autant plus attentif au thème que durant son enfance « il a mené aux champs et gardé vaches, moutons et chèvres » et qu’il est resté de ce fait « attentif à la transhumance ou au pâturage de ferme ». Ce partage des valeurs du terroir est sans doute pour beaucoup dans son appréciation favorable du livre.
Préfacier de l’ouvrage, François Morel liste quant à lui les vingt choses à savoir sur l’auteur et autant de bonnes raisons de lire La vie secrète des vaches. Lui qui avec « Meuh ! » s’est placé sous le registre de Marcel Aymé constate que Rosamund Young a écrit un livre d’amour qui s’inscrit dans le sillon de son attirance pour la race bovine.
Preuve que cet écrivain en herbe a suscité l’admiration, Alan Bennett, célèbre auteur britannique de La Reine des lectrices, écrit à son tour un avant-propos où il souligne que La vie secrète des vaches est un livre salutaire : « un livre qui change notre vision du monde, un livre où les bêtes ne sont pas aussi bêtes quel l’on aimerait parfois le croire ».
Quand une fermière britannique déclare sa passion pour les bovins
Rosamund Young sait de quoi elle parle, elle dont la famille est installée depuis 1953 dans une ferme du centre de l’Angleterre. Elle a toujours vécu dans cette ambiance propice à écrire « un livre d’observation, d’affection, d’amitié, de tendresse, de compassion, de complicité pour les vaches ».
C’est ainsi que Rosamund Young nous fait partager son quotidien où « les vaches sont des individus uniques... Quand nous avons l’occasion de traiter une bête d’élevage comme un animal domestique, en raison d’une maladie, d’un accident ou d’un deuil, elle fait preuve d’une grande intelligence, d’une immense capacité d’affection et d’une aptitude à s’adapter à des changements d’habitudes. »
Cette empathie pour la gent animale, et les vaches en particulier, révèle toute la sincérité de ce témoignage vécu, sur le terrain, où Rosamund Young connaît personnellement chaque bête de son troupeau. Elle est capable de les nommer toutes par leurs noms. Elle s’amuse même à recomposer leur arbre généalogique que l’on retrouve en fin de l’ouvrage.
Des anecdotes savoureuses prises sur le vif émaillent le livre
Ce qui pourrait paraître simple voire simpliste est en fait un hymne à la nature, telle qu’elle vit, se reproduit, s’adapte et se renouvelle. L’auteur nous parle de Miss Bumble, de Chippy, de Jake, de Fat Hat ou de Duke of York... Tous veaux, vaches ou taureaux dont elle prend soin et qui, à leurs façons, l’observent et lui rendent bien cette affection. Chacun ou chacune a sa personnalité, solitaire ou indépendant, attaché à son confort ou désireux de grands espaces, ses compagnons de ferme sont depuis plus de cinquante ans les témoins de sa vie. Elle en parle avec beaucoup de discernement, de bon sens et rend la relation familière aussi évidente que la proximité est réelle.
Cette chronique se révèle à la fois drôle et pleine d’enseignements sur un environnement qui est la plupart du temps étranger aux citadins mais nous rappelle que cette cohabitation pacifique est la recette d’une harmonie ancestrale.
Un anthropomorphisme qui n’est pas sans rappeler le ton d’une fable
Parmi les informations récoltées à la lecture, certaines ne manqueront de surprendre ou d’amuser, comme celle qui suggère que les vaches blessées se repèrent à leur prédilection pour les feuilles de saules (parce qu’elles leur font du bien). Ou que les vaches se vexent (si, si), apprécient peu les odeurs de parfum, qu’elles savent distinguer les couleurs et que, d’après l’expérience de Rosamund Young, les vaches échangent entre elles, se donnent des conseils, en matière de vêlage, et même auraient tendance à « parler » de la pluie et du beau temps.
Rosamund Young met en avant une agriculture affective, basée sur un respect entre l’animal et l’homme, qui semble donner d’excellents résultats. C’est instructif à lire et souvent plaisant par les anecdotes relatées.
Un mot sur l’auteur
Rosamund Young a 64 ans, vit dans une ferme du Worcestershire où ses parents se sont installés dans les années 1950. Pionniers du bio, ils avaient déjà à cœur de placer la bienveillance comme une vertu doublée d’une réalité, pensant que des animaux bien soignés sont moins malades et que leur bien-être est le garant de leur santé. Elle affirme que chaque animal possède son caractère, sa sensibilité et son intelligence.
*Journal du Dimanche daté du 19/11/2017
Editions Stock
Traduit de l’anglais : Sabine Porte
Date de parution : octobre 2017
Format : 140 x 200 mm